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L’ «importation intelligente / Smart Import» peut-elle créer un contenu d’apprentissage intelligent ?

Article proposé par la Dre Jue Wang Szilas et la Dre Patrizia Birchler Emery, CFCD

Ce billet explore le potentiel pédagogique des moteurs d’intelligence artificielle Smart Import et Nolej.

H5P Smart Import et Nolej sont des solutions innovantes en matière de conception pédagogique assistée par l’IA, en particulier pour la création de contenus d’apprentissage interactifs basés sur du texte. Ces deux outils s’appuient sur l’IA pour analyser et transformer des documents existants – tels que des textes, des images et des vidéos – en formats interactifs et attrayants.

Nous avons testé chacun de ces outils, afin de mieux comprendre leurs capacités et limites : le premier test avec H5P Smart Import utilise une vidéo YouTube de trente minutes d’une présentation destinée à un large public, et le deuxième test avec Nolej a été effectué avec une vidéo de trois minutes sur une technique particulière d’imagerie numérique. Les résultats sont similaires.

Présentation des outils: H5P Smart Import et Nolej

En matière de personnalisation, H5P Smart Import et Nolej offrent des ajustements de base, avec Nolej proposant des options avancées. Les deux outils s’intègrent facilement aux principales plateformes LMS (Moodle, Canvas, Blackboard), rendant leur utilisation dans divers environnements pédagogiques simple. H5P Smart Import est particulièrement efficace pour les contenus structurés, tandis que Nolej excelle avec des supports plus variés et favorise la collaboration entre enseignant-es. 

Pour l’accès, H5P Smart Import propose une période d’essai de 30 jours, alors que Nolej permet un essai de 10 jours pour créer jusqu’à trois modules d’apprentissage. Avec H5P Smart Import les contenus générés sont réutilisables, mais nécessitent un abonnement pour un accès permanent après l’essai, alors que sur Nolej ils restent visibles même sans abonnement. En termes de langues, H5P Smart Import est limité à l’anglais, tandis que Nolej est disponible en plusieurs langues, avec des variations d’efficacité selon la complexité. 

Ces outils conviennent à un large éventail d’enseignant-es, du primaire au supérieur, et sont adaptés à différents types d’enseignement, y compris la formation professionnelle. Il est recommandé de posséder des compétences numériques de base pour les intégrer efficacement dans la pratique éducative. 

En conclusion, H5P Smart Import et Nolej offrent des solutions complémentaires pour créer des activités interactives, répondant aux besoins variés des enseignant-es  selon la nature et la complexité des contenus pédagogiques. 

Pour tester ces outils, nous avons réalisé un essai avec H5P Smart Import et un autre avec Nolej. Les résultats se sont avérés très similaires pour les deux outils. Cependant, comme H5P Smart Import nécessite un abonnement pour partager les résultats, nous n’avons pas pu les diffuser et avons donc réutilisé les résultats obtenus via Nolej. Pour ces tests, nous avons utilisé deux ressources différentes : une conférence de 30 minutes et une vidéo YouTube de 3 minutes. Nous allons présenter ici le déroulement des tests, les résultats obtenus, ainsi qu’une analyse et des commentaires sur chaque étape. 

Test avec H5P Smart Import

1. Contexte et ressources utilisées

Suite à une démonstration convaincante de l’équipe de H5P, les auteur-es ont obtenu un accès temporaire pour tester les fonctionnalités de Smart Import avec des collègues. Pour cette évaluation, un extrait de vidéo d’une conférence de 30 minutes en anglais a été sélectionné : il s’agit d’une présentation sur un MOOC visant à préserver une écriture en voie de disparition intitulée Teaching an Endangered Script through MOOC. Cette ressource a été choisie afin d’évaluer la capacité de H5P Smart Import à générer des activités pédagogiques interactives à partir d’un contenu à la fois long et complexe. Dans cette vidéo, l’auteure aborde plusieurs points clés : 

  • Écriture Dongba : un patrimoine culturel unique.
  • Objectif du MOOC : sensibilisation et préservation de la culture Naxi.
  • Scénarisation du cours : une approche pédagogique interactive.
  • Enseignement multilingue : promotion du plurilinguisme et de la diversité culturelle.
  • Défis de conception : standardisation et accessibilité de l’écriture.
  • MOOCs comme plateformes de recherche : vers une science citoyenne.

2. Déroulement et résultat

Les auteur-es ont utilisé Smart Import pour convertir la vidéo en transcription textuelle. Une relecture humaine a permis de corriger les éventuelles erreurs, garantissant ainsi la qualité du texte de base. À partir de ce contenu corrigé, Smart Import a généré huit types d’activités d’apprentissage, incluant une vidéo interactive avec mots-clés et questions, un quiz, un glossaire, une carte de concepts, une activité glisser-déposer, des flashcards, ainsi qu’un résumé. Ces activités ont ensuite été partagées avec des collègues, invité-es à les compléter et à donner leur avis.

Cliquez ici pour voir vers le contenu créé (lien vers le site Nolej pour les raisons mentionnées plus haut).

3. Analyse des résultats d’utilisation

Points positifs:  

  • Qualité de la transcription : la transcription automatique de la vidéo est généralement précise, mais nécessite une relecture humaine pour assurer sa fiabilité.
  • Pertinence des mots-clés : les mots-clés proposés sont pertinents et enrichis d’explications claires, comme Cultural heritage, Didactic principles, Dongba script, Endangered languages, Hieroglyph instructional design, MOOC, Multilingual interface, Naxi ethnic group, Scripts, et World Endangered Writing Day.
  • Qualité des exercices de compréhension : les exercices tels que les quiz, flashcards et activités de glisser-déposer sont efficaces pour renforcer les connaissances factuelles basées sur le texte, facilitant ainsi la révision des concepts clés. 

Points à améliorer: 

  • Répétition : les activités générées présentent parfois des redondances, certaines questions se répétant dans les quiz. Cette redondance est également fréquente dans les mots-clés, le glossaire et les flashcards.
  • Incohérence dans les réponses proposées : des divergences existent entre les réponses attendues dans différents types d’exercices. Par exemple, pour la question « What is the goal of the MOOC? », la réponse dans le quiz est “To preserve and revitalize the ancient Dongba script and Naxi Dongba culture”, tandis que la carte de concept indique que “The MOOC aims to explore the role of multilingualism in preserving and transmitting endangered languages and scripts and its potential impact could revolutionize attitudes and practices towards language conservation.”
  • Feedback erroné : certains retours automatiques sont inexacts, proposant des réponses ou explications incorrectes. Sur la même question « What is the goal of the MOOC? », des informations fournies sont inexactes.
  • Questions ouvertes manquantes : l’absence de questions ouvertes dans les exercices limite l’apprentissage à un niveau très basique, ne permettant pas de développer des compétences de réflexion critique.

4. Conclusion

Les résultats indiquent que H5P Smart Import est efficace pour générer des activités d’apprentissage basées sur le texte, en particulier pour l’acquisition de connaissances déclaratives. L’outil renforce la maîtrise des concepts clés en intégrant ces éléments de manière répétée dans les activités proposées. Cependant, certaines limites demeurent. H5P Smart Import n’est pas encore en mesure de générer des questions ouvertes stimulant une réflexion critique, ni de concevoir des distracteurs complexes dans les questions à choix multiples, ou de faciliter l’apprentissage collaboratif. De plus, l’outil ne prend actuellement en charge que des contenus en langue anglaise, ce qui souligne la nécessité d’ajouter d’autres langues pour accroître l’accessibilité et l’utilité de l’outil. 

Test avec Nolej

1. Contexte et ressources utilisées 

La vidéo servant de base au test avec Nolej a été présentée dans le cadre d’un cours sur les techniques d’imagerie numérique (niveau universitaire) destiné aux étudiant-es en humanités numériques, actifs/ves dans toutes les branches où des objets sont impliqués (archéologie, histoire de l’art, manuscrits, etc.).  Différents types d’imagerie sont passés en revue et testés, afin de connaître leurs spécificités et leurs utilisations pratiques, dans le but de pouvoir ensuite appliquer la technique la plus appropriée dans le contexte de la recherche.   

La vidéo utilisée présente l’une de ces techniques, la RTI (Reflectance Transformation Imaging), et son application à l’archéologie. Il s’agit d’une vidéo faisant la publicité d’un outil commercial et les étudiant-es sont invité-es à garder un œil critique en la visionnant.   

Il ne s’agit donc pas d’une vidéo de cours, mais d’une vidéo de démonstration (ce qui n’a aucune incidence sur les résultats du test). La vidéo est visionnée après une introduction théorique sur la RTI et son fonctionnement, pour les raisons suivantes :  

  • Elle présente visuellement un outil spécifique pour la RTI : composants, manipulation de l’équipement, mise en place, etc.  
  • Elle montre l’outil en cours d’utilisation.  
  • Elle présente les résultats obtenus.  
  • Elle présente l’utilité et l’intérêt de photographier des objets avec cet outil et cette technique (sans toutefois en mentionner les limites). 

  2. Déroulement et résultat 

La première étape a consisté en l’utilisation de Nolej pour convertir la vidéo en transcription textuelle. Comme pour Smart Import, une relecture humaine a été nécessaire enlever les quelques erreurs de transcription. C’est à partir de ce contenu corrigé, que Nolej a généré des activités d’apprentissage, vidéo interactive, cartes conceptuelles, quiz, drag the word, flashcard, ainsi qu’un glossaire, des points clés et un résumé. Nolej a proposé également des contenus supplémentaires : mots croisés, mots secrets, idées d’apprentissage par projet.  

Cliquez ici pour voir le contenu créé.

 3. Analyse des résultats d’utilisation 

 Points positifs: 

  • Qualité de la transcription : la transcription automatique de la vidéo est généralement précise, mais nécessite une relecture humaine pour assurer sa fiabilité.
  • Qualité de certains exercices de compréhension : les quiz et les flashcards, basés sur des phrases entières de la transcription et non sur des mots clés étaient satisfaisants, même si limités en raison de la brièveté de la vidéo.
  • Idées d’apprentissage par projet : trois des quatre suggestions étaient intéressantes. 

Limites et points d’amélioration : 

  • Mots-clés et redondance : les mots clés retenus par l’AI sont trop basiques et généraux, alors que d’autres termes cités dans la vidéo auraient été plus importants et plus appropriés. Il en découle que toutes les activités créées à partir des mots clés (redondance) étaient peu pertinentes (vidéo interactive, glossaire, cartes conceptuelles, drag the word, mots croisés, mots secrets). .
  • Questions ouvertes manquantes : aucune proposition de questions ouvertes, nécessitant analyse et réflexion (par exemple: quelles sont les caractéristiques communes des objets soumis à la RTI, la technique s’applique-t-elle ou est-elle utile à tout objet archéologique, etc.)
  • Limites liées à la reconnaissance du texte uniquement : l‘IA étant basée sur du texte, il manque au cours interactif proposé un ensemble de questions à explorer sur ce qui est montré dans la vidéo et qui peut être tout aussi important que le discours en termes d’objectifs de visionnage (par exemple : la taille et les composants de l’équipement, l’environnement dans lequel la RTI est réalisée, la taille et les caractéristiques des objets traités, etc.) 

 4. Conclusion  

Nolej est un outil efficace, mais il est préférable de générer le texte de base soi-même, en y intégrant les mots-clés et les concepts dont les étudiant-es doivent se saisir. Le modèle d’apprentissage de cette IA est encore basique, ne correspondant qu’au premier niveau de la taxonomie de Bloom. 

Un défaut majeur est que l’IA n’analyse pas les images et ne génère donc pas de mots-clés ou de quiz sur ce qui est montré dans une vidéo, alors que de nombreux domaines d’études comportent des apprentissages liés à un ensemble de gestes à pratiquer ou des items à observer.  

Enfin, les questions de réflexion et d’analyse ainsi que les questions ouvertes sont totalement absentes. 

 

Conclusion

Les résultats ont révélé que ces deux outils généraient efficacement de nombreuses activités d’enseignement basées sur le texte, améliorant principalement l’apprentissage des connaissances déclaratives. Ils ont notamment amélioré la maîtrise et la compréhension des concepts clés en augmentant leur fréquence dans les activités. Cependant, des limites ont été identifiées, par exemple l’incapacité de générer des questions ouvertes nécessitant une réflexion critique, ou d’incorporer des distracteurs approfondis dans les questions à choix multiples, ou de faciliter l’apprentissage collaboratif. De plus, ces outils ne permettent pas de développer des activités sur des objets visuels, ce qui en limite la portée dans de nombreux domaines. En outre, la version actuelle Smart Import ne prend en charge que les ressources en langue anglaise, d’autres langues devant encore être développées.  

Grâce à cet essai, les avantages d’un moteur d’IA ont pu être reconnus, de même que son potentiel pour augmenter de manière significative la productivité dans la création de contenu d’apprentissage interactif basé sur le texte et pour améliorer l’accessibilité. Simultanément, le test a permis d’acquérir une meilleure compréhension des risques, en particulier des préoccupations concernant l’étouffement de la créativité et la nécessité d’une intervention humaine pour maintenir l’intégrité pédagogique. 

Questions pour le futur...?

Il est clair cependant que l’utilisation de ces outils d’IA dans la conception pédagogique interpelle et ce, à plusieurs niveaux. Par exemple, dans quelle mesure les contenus d’apprentissage interactifs créés par des outils d’IA seront-ils crédibles dans un environnement universitaire ? Ou encore, comment trouver un équilibre entre l’automatisation et la créativité dans la conception des contenus d’apprentissage ? Lors de l’intégration d’outils d’IA tels que Smart Import dans la conception pédagogique, où les rôles humains ne peuvent-ils pas être remplacés par l’IA ?  

Le test effectué et ses résultats invitent à la réflexion sur l’évolution du rôle de l’IA dans l’élaboration future de la création de contenus d’apprentissage intelligents. 



Recette de l’ens-AI-gnement revisitée

Comment exploiter la puissance et les limites des IA génératives pour engager activement les étudiant-es dans leurs apprentissages

 

Quand l’enseignement perd de sa saveur

Dans la représentation collective, l’enseignant-e universitaire est souvent imaginé-e comme le/la chef étoilé-e, servant à des étudiant-es affamé-es un plat unique de savoir. Mais, aujourd’hui, force est de constater que le soufflé est retombé. On observe en réalité, dans les auditoires, des étudiant-es luttant contre le gavage de savoirs et déjà en sieste post-prandiale. Alors, comment rendre l’apprentissage plus digeste ?

L’arrivée de l’intelligence artificielle (IA) à l’université bouleverse d’autant plus la recette classique de l’enseignement. Face à des étudiant-es toujours plus connecté-es, qui ont à portée de main un outil capable de fournir très rapidement des réponses à leurs questions et de prémâcher pour eux/elles une partie de leur travail, le rôle de l’enseignant-e se transforme. Mais plutôt que de laisser l’IA creuser le fossé entre enseignant-es et étudiant-es, pourquoi ne pas considérer cette technologie comme l’ingrédient qui permettra de rétablir les échanges ?

 

Rectifier l’assaisonnement

Depuis plusieurs années, l’approche par compétences fait de plus en plus sens pour de nombreuses formations à l’Université de Genève : l’enseignement vise à développer les compétences qui répondent aux besoins des étudiant-es préparant leur avenir professionnel. L’arrivée de l’IA a bouleversé les habitudes de nombreux/euses professionnel-les de tous domaines ; les besoins de formation des étudiant-es ont, en conséquence, évolué également. Rectifier l’assaisonnement ne suffit pas, il faut revoir les ingrédients de base pour réaligner les objectifs d’apprentissage avec ces nouveaux besoins.

Le cours « Analyse d’articles scientifiques » programmé dans le Bachelor de sciences biomédicales de la Faculté de médecine de Genève, a donc dû revoir ses objectifs. Dans le cadre de ce cours, les étudiant-es sont amené-es à éplucher la littérature scientifique. Se familiariser avec la littérature et la démarche scientifique et développer un esprit critique lors de la lecture d’articles sont les objectifs initiaux de ce cours. Pour atteindre ces objectifs, le cours est donné sous la forme d’un « Journal club » ; les étudiant-es doivent lire l’article en amont du cours et commentent l’article durant une séance guidée par un-e enseignant-e.

Comme dans tout recette traditionnelle de Journal Club, les étudiant-es se présentent souvent en n’ayant lu et digéré que la moitié de l’article, ou avec une compréhension partielle. L’enseignant-e pose alors des questions complexes aux étudiant-es pour stimuler leur réflexion ; questions restent souvent sans réponse de la part des étudiant-es, car trop complexes et non adaptées à leur niveau. Alors l’enseignant-e répond lui/elle-même à ses propres questions. Et bien que le cours se veuille interactif, on retrouve le modèle éducatif classique de transmission du savoir dans lequel l’enseignant-e sert sur un plateau la matière aux étudiant-es.

Mais l’enseignant-e n’est pas toujours expert-e du domaine couvert par l’article. Alors comment, lui/elle, est-il/elle parvenu-e à décortiquer et comprendre l’article ? Très souvent, en utilisant les outils à disposition : livres, autres articles scientifique, internet, et aussi la fameuse encyclopédie en ligne Wikipédia, qui rappelons-le, était tant décriée à l’époque de son apparition. Finalement, ce qui compte, ce n’est pas de « savoir », mais de comprendre comment aller chercher l’information. La compétence que les étudiant-es doivent acquérir est l’utilisation pertinente des outils à disposition pour appréhender et analyser de manière critique un document scientifique. Les outils d’IA s’ajoutent donc aux ustensiles de cuisine permettant de détailler l’information scientifique et d’émulsionner l’esprit critique.

Pour réaliser le cours « Analyse d’articles scientifiques » voici  la recette :

Liste des ingrédients :

  • des étudiant-es
  • une salle permettant aux étudiant-es de se répartir en groupes
  • une connexion internet
  • du temps

Préparation  :

  1. Diviser le groupe d’étudiant-es en sous-groupe de 3 personnes.
  2. Poser une question différente à chaque sous-groupe. La question doit avoir pour but d’approfondir la compréhension de la démarche scientifique menée par les auteur-es.

Exemple : Décrivez le procédé d’isolation des cellules primaires à partir d’une biopsie musculaire, de sélection des cellules satellites et de différenciation en myoblastes (2D). Décrivez le procédé de culture d’une myosphère (3D). Quels sont les avantages et les inconvénients de chaque procédé pour l’étude de la régénération musculaire.

  1. Indiquer à chaque membre du sous-groupe quel outil utiliser pour construire une réponse : un-e membre utilise ChatGPT (ou autre IA générative de texte), un-e membre s’informe sur Internet (ex. Wikipédia), un-e membre lit une publication scientifique complémentaire.
  2. Circuler entre les sous-groupes pour aider les étudiant-es à améliorer leurs compétences informationnelles (ex. qualité du prompt utilisé pour ChatGPT, qualité des mots clefs utilisés pour la recherche d’Google ou sur Pubmed).
  3. Inviter les sous-groupes à mettre en commun les résultats de leurs recherches et à construire une réponse complète, valide et argumentée.
  4. Inviter les sous-groupes à lire leur question en plénière, présenter leur réponse et indiquer les moyens utilisés pour la construction de leur réponse.
  5. Laisser mijoter et discuter avec la classe de la pertinence des informations trouvées via les différentes sources, des avantages et des limites des outils utilisés.

Cette recette encourage les étudiant-es à acquérir les bons réflexes, à s’autonomiser dans la recherche d’informations pour décortiquer et digérer un article scientifique. Et aussi  d’identifier les limites de chaque outil et de discuter de leur origine, notamment des biais de contenus découlant de la nature des données implémentées lors de la phase d’entrainement de l’IA. L’exercice développe l’esprit critique des étudiant-es non seulement sur l’approche méthodologique des auteur-es de l’article étudié, mais aussi sur les productions de l’IA ou la qualité des sources consultées. L’étudiant-e doit repérer lorsque l’outil utilisé raconte des salades.

Image générée par Copilot de Microsoft. Prompt utilisé pour générer la figure : « Un dessin de trois jeunes cuisiniers et cuisinières portant des toques, dans une cuisine, autour d’une grande table de travail. Sur la table, il y a des ingrédients et des ustensiles de cuisine. Au centre de la table, il y a un article de journal scientifique. Un des cuisiniers est en train de découper l’article de papier en s’aidant d’ustensiles représentant l’IA. Un cuisinier tient un ordinateur dans la main. Un troisième cuisinier tient une liasse d’articles de journaux. » Plusieurs outils d’IA générative d’images ont été essayés. Aucun n’a répondu à l’entièreté du prompt. L’image sélectionnée est celle qui se rapproche le plus du prompt cité ci-dessus.

 

Nouvelle recette plus gourmande

Il arrive que l’inconnu puisse nous rebuter. Cependant, lorsque nous apprenons à reconnaître la puissance d’un outil et à l’exploiter dans le respect de ses limites, la découverte devient un véritable régal. Il suffit donc de peler les couches de l’IA pour découvrir les trésors qu’elle renferme.

L’IA s’est invitée à notre table, et bientôt, il sera aussi difficile de nous en passer que de se passer de sel. Savoir assaisonner judicieusement notre pratique pédagogique avec l’IA ajoutera de la saveur non seulement au processus d’apprentissage pour les étudiant-es, mais aussi au plaisir que nous retirons de l’enseignement. Ne reste donc plus qu’à déguster !

 

Billet rédigé avec l’aide de l’IA par Monica DIDIER, enseignante en Bachelor de sciences biomédicales de la Faculté de médecine de Genève. Lien vers la discussion complète avec ChatGPT : https://chatgpt.com/share/67120aa8-924c-8009-a50f-88068e1566a8



Mener des projets concrets liés au digital à l’UNIGE – Retour d’expérience d’un étudiant au cours “Comprendre le numérique 2”

➡️ Lien vers la page du cours

 

Ce billet de blog a été co-écrit par Daniel Dos Santos Casas et Kenneth Rioja.
Le féminin est utilisé tout au long de ce billet pour représenter toutes les personnes, sans distinction de genre, afin de souligner l’importance de l’inclusivité et de l’égalité dans le domaine de l’informatique. Ce choix stylistique vise à inverser la norme traditionnelle et à mettre en lumière la nécessité de repenser les biais linguistiques qui contribuent aux inégalités de genre (Pour plus d’info, voir les capsules vidéo de l’EPFL sur l’égalité par Pascal Gygax, psycholinguiste expérimental et psychologue cognitif à l’UNIL) 

petite salle de cours avec un présentateur devant des étudiantes et étudiants montrant une salle de cours Photo par Kenny Eliason sur Unsplash

Faire des projets concrets sur le numérique suscite votre intérêt ? Vous êtes une professeure intéressée par le numérique, une formatrice qui souhaite en apprendre plus sur la pédagogie par projets ou une étudiante à l’UNIGE qui souhaite faire plus de projets concrets avec des étudiantes d’autres facultés ?  

Le cours Comprendre le numérique répond à ces besoins ! Ce cours transversal a en vue un objectif double dont le premier est d’apporter aux étudiantes une culture générale sur le numérique et deuxièmement, de favoriser les interactions entre les étudiantes de différentes disciplines. Proposé par Prof. Yaniv Benhamou (Faculté de droit, Digital Law Center et Bureau de la transformation numérique BTN) et Seth Médiateur Tuyisabe (Faculté de droit), le cours est proposé sur deux semestres, en hiver, le cours est séparé en deux, 1) le premier est un enseignement ex-cathedra plus général et pluridisciplinaire ; 2) le deuxième, au printemps, articule études de cas concrets et apprentissage par projet. Nous parlerons de ce deuxième pan tout au long de ce billet de blog. 

Le cours Comprendre le Numérique 2 dispensé au printemps prend donc la forme de cliniques du numérique. Les étudiantes issues des diverses facultés traitent en groupe des problématiques concrètes du numérique et développent ainsi leurs compétences numériques et transversales. Elles mettent en pratique leurs diverses connaissances théoriques et les appliquent concrètement au travers d’une expérience collaborative et interdisciplinaire. Les cas d’étude sont proposés par des collègues de l’institution ou des partenaires externes. Les thématiques abordées sont les suivantes : art numérique, égalité, cybersanté, environnement, humanités numériques, sociétés numériques, science citoyenne et technologie éducative, justice (source) 

Lors de la précédente édition au printemps 2024, huit groupes de travail ont été répartis sur huit projets différents. Nous suivrons l’expérience et le travail du groupe composé d’Ayman Chidda (B1 au CUI), Daniel Dos Santos Casas (M2 au MALTT) et Nada Metwaly (B3 en Droit) qui se sont intéressées aux usages scolaires de l’intelligence artificielle générative (IAG) et plus particulièrement à la place de la pensée critique dans un contexte d’ère informationnelle assisté par l’IAG. 

Retour d’expérience de Daniel Casas 

L’objectif du semestre : produire un livrable utile à la population  

Le cas soumis et traité par le groupe était le suivant : 

A l’école, on insiste beaucoup sur le principe de la citation des sources pour éviter toute forme de plagiat et respecter le droit d’auteur. Comment ce principe est-il transformé par l’émergence d’IAG ? Comment sensibiliser un public de jeunes (15-19 ans) à ces questions ? 

Un des principaux obstacles du travail en début de semestre a été la définition du cadre. Les IAG doivent avant tout être définis et compris, avant de s’attaquer à la problématique de citation et de plagiat. En effet, nos recherches préliminaires nous ont montré que ces deux domaines ne s’appliquent pas strictement qu’aux IAG et restent plutôt générales. C’est pourquoi nous nous sommes redirigées vers un cadre plus précis et plus orienté sur les IAG, leurs fonctionnements et des dangers qui leur sont propres. Nous avons donc choisi de réajuster la problématique de la sorte :  

Comment initier les adolescentes âgées de 15 à 19 ans à développer leur esprit critique face aux intelligences artificielles génératives ?  

Dès lors, avec un cadre redéfini, nous avons pu nous concentrer plus efficacement sur des problématiques fortement liés aux IAG, sans pour autant sortir du cadre initial donné.  

Le public cible se trouve être l’ensemble des élèves du secondaire II, c’est-à-dire les adolescentes et les jeunes adultes qui ont entre 15 et 19 ans. La réflexion s’est donc tournée sur l’élaboration d’un MOOC (Massive Open Oline Course). Néanmoins, voyant les semaines défiler et les échéances du cours approcher, nous avons décidé de réduire nos attentes en développant plus concrètement un cours se déroulant sur deux périodes, soit un total de 2 * 45 minutes. 

Nous avons souhaité articuler la formation autour de ces deux objectifs : (I) la sensibilisation les adolescentes aux usages scolaires des intelligences artificielles génératives (IAG) et (II) le développement de leur esprit critique dans le contexte des dangers informationnelles médiatiques et, surtout, de déploiement des IAG 

Nous nous sommes essentiellement concentrées sur l’appropriation du sujet et de la thématique, c’est-à-dire le développement de notre esprit critique dans une ère d’IAG. En particulier, l’idée d’un cours hybride nous semblait la plus pertinente. La formation se déroulerait en premier à travers une vidéo que les participantes pourraient visionner individuellement et à leur rythme. A l’issue de ces vidéos, quelques activités seraient proposées : dans un premier temps, les élèves réponderaient à des questions concernant le contenu des vidéos visionnées précédemment. Ensuite, il leur serait demandé de participer activement et collectivement à une discussion argumentée. Enfin, la formation amènerait les élèves à collaborer autour de la co-création d’une charte d’utilisation éthique des intelligences artificielles génératives.  

Conscientes que ce livrable ne pourrait être utilisable principalement via le corps enseignant, nous avons donc choisi aussi de développer un guide d’animation à destination de ce dernier afin de permettre une prise en main guidée et effective de notre livrable dans les salles de classes. Ce guide rassemble les objectifs pédagogiques que les élèves doivent atteindre grâce à la formation. Il explique également le déroulement de la formation, le matériel nécessaire, ainsi que le temps attribué à chaque étape. 

Notre formation est prête à l’emploi et peut être testée par les enseignantes qui désireraient se l’approprier (lien). Nous vous serions extrêmement reconnaissant d’envoyer tout commentaire constructif à l’adresse suivante : casas.daniel@outlook.fr 

Développement du livrable  

Le développement du livrable s’est déroulé en plusieurs étapes clés :  

Elaboration d’un planning de travail 

Avant toute chose, nous avons conçu un planning retraçant les points clés définis dans le cadre du cours : le début de la production de notre livrable, la date de rendu du livrable, le poster à réaliser pour la communication de notre projet et les préparatifs pour la présentation finale.  

Ce planning de travail a pour but de poser un cadre et un fil rouge qui nous suivons tout au long du développement, afin de ne pas se perdre ou se mêler les pinceaux. Bien sûr, il permet également de servir de rappel aux différents deadlines à respecter, durant le semestre de travail.  

Il faut, toutefois, garder en tête que le planning n’est pas immuable. Il est tout à fait possible de le modifier et de le réajuster en fonction des imprévus ou des changements de directions du contenu du projet. Le planning est à garder à jour constamment.   

Mon ressenti, lors de cette étape, était que cela pouvait sembler décourageant et interminable, au vu des nombreux changements auxquels nous avons du procédé. Mais il ne faut baisser les bras, surtout lors de cette étape qui détermine les bases du projet entier.  

Définition de la problématique et de son cadre 

Il s’agit peut-être du point qui nous a pris le plus de temps. Nous n’avions pas saisi de manière claire la définition du cadre selon la problématique du commanditaire. Il nous a fallu plusieurs réunions afin d’affiner une problématique précise et pertinente dans le cadre donné initial. Toutefois, tout ce temps investi dans ce seul point s’est révélé efficace, car il nous a permis d’avoir un fil rouge à suivre et de garder des objectifs précis en tête, de nous donner des raisons quant à notre travail, boostant indirectement notre motivation et implication dans notre projet.  

Cette étape a également été décourageante, durant un moment, à cause du manque de cadre clair et de la problématique de notre projet.  

Premières propositions de solutions, en parallèle de nos recherches de bases scientifiques

Nos premières solutions se sont construites autour de la problématique donnée. C’est pourquoi il est important définir clairement cette dernière. À la suite de cela, nos premières idées de solutions ont afflué, tout en menant des recherches sur le sujet que nous traitions, pour mieux l’approprier et affiner la justesse de nos solutions.  

Nous avons procédé à une recherche de solutions existantes dans le domaine : flyers, documents, sites web, MOOC, cours universitaires, etc. Et nous nous sommes imaginées produire quelques-unes de ces solutions. Cependant, nous n’avons pas trouvé de côté innovant concernant le support, puisque ces solutions existaient déjà pour le thème choisi. Nous nous sommes senties comme dans une impasse, dans une impossibilité de continuer notre projet dans la direction que nous lui avions initialement donné… 

Sélection d’une solution précise et définie

Alors, nous avons choisi une formation hybride pour une classe du secondaire : une partie individuelle devant son poste d’ordinateur et une partie collective où chacune participe de vive voix. Notre but est, grâce à la partie individuelle, d’introduire chaque élève au contenu et aux informations pertinentes à son rythme. Chacune gère son propre tempo. Puis, nous avons souhaité mettre en avant le travail collectif et la création d’une charte d’utilisation éthique où chacune peut poser sa pierre à l’édifice. Cette charte n’est pas absolue et deviendra probablement rapidement obsolète, à la vue de la rapidité d’évolution du domaine de l’IA. Toutefois, l’exercice poussera les élèves à réfléchir de manière critique vis-à-vis de cette technologie et à comprendre les différents enjeux qui y sont liés.  

Cette étape a reboosté notre motivation. Nous apercevions enfin un but clair vers lequel avancer. C’était le tremplin nécessaire à la réalisation finale.  

Réalisation d’une maquette du livrable sur Figma

Une fois la solution sélectionnée, nous avons procédé à la création d’une maquette de la plateforme hébergeant notre formation hybride. Nous avons utilisé Figma pour la créer. Cette étape n’a pas été la plus difficile étant donné que je possédais déjà quelques compétences sur ce logiciel, acquis dans le cadre de mon master (MALTT). Cette maquette simule l’expérience d’une utilisatrice qui navigue au sein de la plateforme. On y trouve une page index et les deux pages des deux chapitres développés.  

Création d’un guide d’animation pour accompagner l’enseignante dans notre formation

Comme nous voulions que ce soient les enseignantes du secondaire qui s’approprient notre formation, nous devions créer un guide d’animation pour les accompagner et expliquer chaque étape de notre formation et afin d’expliquer leur importance.  

Ce guide d’animation détaille les objectifs pédagogiques, le temps attribué aux différentes étapes ainsi que leur déroulement, le matériel nécessaire, ce qui est attendu aux élèves et les instructions que l’enseignante doit donner à sa classe.  

Récolte de feedback et implémentation des retours et suggestions 

Pour affiner notre formation, nous nous sommes appuyées sur différents feedbacks lors du semestre. Ils ont été essentiels pour ajuster notre dispositif et mettre en lumière des incohérences ou des incompréhensions là où nous ne les avons pas soupçonnées.  

En effet, notre encadrant Kenneth Rioja, ainsi que Seth Mediateur Tuyisabe et le professeur Benhamou ont testé notre formation à travers des questionnements, des demandes de justifications sur certains choix tout en proposant différentes pistes.  

De plus, deux membres du Pôle de Soutien à l’enseignement et à l’apprentissage (SEA) nous ont donné un feedback sur notre formation, ce qui nous a permis de confirmer la plupart de nos choix tout en proposant quelques réajustements pertinents.  

Enfin, les derniers feedbacks que nous devrions recevoir sont ceux des utilisatrices elles-mêmes, enseignantes comme étudiantes, qui voudraient tester notre dispositif. 

Parcours tout au long du semestre 

L’obstacle principal a été le manque de clarté de la problématique donné par le commanditaire. En effet, la question nous semblait trop ouverte et pas assez opérationnelle. Nous souhaitons donc vous rendre attentives quant à la clarté et la définition de la problématique et du cadre afin que les étudiantes puissent s’attaquer aux tâches demandées dès que possible.  

Ensuite, un autre obstacle était les changements opérés dans la constitution du groupe. Plusieurs membres du groupe ont quitté le projet durant le début de semestre et nous nous sommes retrouvées à seulement 3 membres, en comparaison avec les autres groupes, composés de 5 à 8 membres. Pour nous adapter, nous nous sommes donc réparties les tâches principales entre nous trois, nous obligeant malheureusement à délaisser certains points de côté. En effet, nous avons préféré concentrer nos ressources sur un contenu réalisable et terminer dans un temps limité.  

Enfin, il nous fallut mettre un accent particulier sur l’organisation de notre travail et de la répartition des tâches. Pour cela, nous avons suivi un planning des tâches à faire et de leurs deadlines pour le développement du projet, dès le début. Ainsi, chacune est au courant des tâches qu’elle doit accomplir et pour quand. Bien sûr, la communication reste primordiale, notamment si une des membres du groupe émet des doutes sur ce qu’elle doit accomplir ou pour se préparer aux divers imprévus. En outre, ce n’est pas parce que chacune sait ce qu’elle doit faire qu’il faut ignorer les réunions régulières. Elles restent capitales pour s’assurer que tout le monde est sur la même longueur d’onde pour le développement du projet et des tâches qui sont accomplies, pour en garantir la congruence et veiller à ce que les deadlines soient respectées.  

Perspectives 

Pour la suite, nous espérons, dans un premier temps, améliorer notre maquette et son contenu, en y appliquant les divers feedbacks que nous avons reçu et que nous pourrions recevoir par la suite. Puis, dans un second temps, nous aimerions élargir les thématiques abordées dans notre formation (la protection des données, la désinformation, la citation de contenu généré par l’IA, etc.) 

Take Home Message 

  • Tenir un journal de bord et en sortir des propositions d’amélioration concrètes à présenter au groupe la semaine suivante nous a aidé à être plus organisées. 
  • Organiser via la mise en place d’un planning et le remanier en fonction de l’avancée à chaque rendez-vous hebdomadaire. 

Contribution des auteurs 

KR a initié l’écriture et de ce billet de blog. KR a rédigé la première ébauche de la structure générale. KR a écrit la première ébauche de la partie introductive et a procédé aux corrections du manuscrit. DDSC a écrit la première ébauche des parties Objectif, Développement, Parcours, Perspectives et Take Home Message. DDSC et KR ont contribué équitablement au billet final.

Pour citer de billet : Dos Santos Casas, D., & Rioja, K. (2024, Septembre). Mener des projets concrets liés au digital à l’UNIGE – Retour d’expérience d’un étudiant au cours “Comprendre le numérique 2”. CIEL – Communauté d’intérêts pour l’enseignement en ligne. article en ligne

 

➡️ Lien vers la page du cours



Retour sur IA et études : duo gagnant ? programme visant à sensibiliser les étudiant-es à l’intelligence artificielle (IA)

Suite aux recommandations formulées par l’UNIGE quant à l’usage des intelligences artificielles génératives (IAG), la Division de la Formation et des Etudiants (DIFE) a décidé, fin 2023, d’élaborer un programme de sensibilisation à l’utilisation des IAG en contexte académique, à destination des étudiant-es.
En concertation avec la Division de l’Information Scientifique (DIS) et le Bureau de la Transformation Numérique (BTN), une enquête, des focus groups et des entretiens individuels ont été menés pour cerner les besoins et souhaits des étudiant-es en lien avec l’utilisation des IAG.

L’analyse des résultats a révélé un intérêt marqué pour les fondamentaux de ChatGPT ; ses cas d’utilisation pratique ainsi que la découverte et l’exploration d’autres IA alternatives. Trois ateliers, sous la bannière, « IA et études : duo gagnant ? Utiliser ChatGPT et ses acolytes pour favoriser sa réussite » ont ainsi été conçus. Les objectifs étaient de doter les étudiant-es de connaissances et compétences de base afin qu’ils/elles puissent utiliser les IAG de manière pertinente et faire preuve d’esprit critique. Un accent particulier a été mis sur la nécessité de rester vigilant-e face aux réponses générées par ces outils car ces dernières peuvent être incorrectes, non pertinentes, voire totalement farfelues. Ces trois ateliers visaient à sensibiliser et non à imposer l’utilisation des IAG. Il convient de rappeler que son adoption par les étudiant-es reste soumise à l’appréciation de chaque enseignant-e, dans le respect du cadre réglementaire et des recommandations propres à chaque faculté.

Les 3 séances ont affiché « complet » avec un maximum de 30 inscriptions possibles par atelier afin de permettre une approche individualisée incluant des parties pratiques. Jehan Laliberté, indépendant et expert IA, a animé ces séances dont vous retrouverez les supports sur Moodle (accessible aux membres des universités et hautes écoles suisses). Il a également participé à l’enregistrement, ouvert au public, d’un podcast « comment l’IA peut m’aider dans mes études ? », réalisé par Le Point J dans l’espace Vie de Campus d’Uni Dufour. Cet événement a clos le programme.

Les retours ont été très positifs aussi bien de la part des participants-es que de l’animateur et des acteurs et actrices impliqués dans l’élaboration de cette offre. Les résultats des quinze évaluations récoltées indiquent que les objectifs des trois ateliers ont été atteints : les étudiant-es estiment maîtriser les concepts-clés des IAG et mesurer l’impact que ChatGPT, par exemple, peut avoir dans leur quotidien. Ils se sentent capables de formuler des requêtes (prompts) pertinentes et d’utiliser ChatGPT de manière responsable et efficace. Globalement, ils affirment que les contenus proposés répondent adéquatement à leurs besoins en contexte académique.

Cette première expérience est très concluante. Elle a toutefois mis en lumière une grande disparité dans la connaissance et l’utilisation des IAG. Certain-es cherchent des conseils avancés tandis que d’autres les découvrent. Certaines personnes y voient une « révolution », d’autres, un danger pour l’avenir. Il y a toutefois consensus sur le fait que l’utilisation des IAG devrait être enseignée et encadrée. Cela permettrait, selon les étudiant-es, de mobiliser ces outils à bon escient et de façon pertinente en soutien à la réalisation de certaines tâches académiques. Cela permettrait aussi de connaître les limites actuelles des IAG et d’éviter les risques liés à un mauvais usage. D’autres initiatives pour la formation des étudiant-es et d’autres membres de la communauté académique sont actuellement à l’étude.



Le point aveugle

Dans ce billet, une fois n’est pas coutume, nous parlerons d’écologie. La rencontre du CIEL avec la Terre, en quelque sorte.

Il peut sembler quelque peu déplacé d’aborder ce thème au milieu d’articles sur le numérique et ses usages pour l’enseignement et l’apprentissage. D’ailleurs, parlant d’écologie, le numérique n’est-il pas ce lieu dématérialisé, supprimant avantageusement l’usage massif du papier (donc l’abattage d’arbres), abolissant les distances (et donc les transports matériels), nous unissant tous dans un monde éthéré (le cloud), où, en quelques clics discrets, sur des terminaux toujours plus légers, nous pouvons exercer nos activités de plus en plus virtualisées, s’affranchissant des lourdes (et polluantes) contraintes du monde matériel ? Qui plus est, le numérique n’est-il pas la voix de l’avenir pour assurer la transition écologique, optimisant nos processus pour les rendre plus économes et moins polluants, via ce qu’il est convenu d’appeler la «double transition», numérique et écologique ?

Retour à la réalité d’aujourd’hui…


Le numérique pollue. Beaucoup. Beaucoup trop.

Des chiffres ? Des lettres plutôt pour commencer, les (extraits de) titres d’ouvrages grand public récents parus sur la question sont éloquents : «L’enfer du numérique» (Pitron, 2021), «un désastre écologique» (Flipo, 2021), «On va droit dans le mur ?» (Julia, 2022). Malgré leurs titres tapageurs, ces ouvrages sont tout à fait documentés, et étayés par des études sérieuses réalisées par exemple par l’ADEME (l’Agence de la transition écologique en France) ou le Shift Project (think tank œuvrant pour une société décarbonée, composé de scientifiques). On cite souvent le chiffre de 4 % des émissions de gaz à effet de serre, chiffre qui peut sembler modeste, mais qui est deux fois plus élevé que celui de l’aviation civile ! Mais au-delà des chiffres, c’est avant tout la destruction et la contamination de larges zones géographiques, liées notamment aux activités minières et au traitement (illégal) des déchets électroniques, la monopolisation de l’énergie par les centres de données (le «cloud»), l’épuisement progressif des ressources, etc. Sans oublier les conditions sanitaires et sociales inimaginables grâce auxquelles nos chers appareils sont produits (mines en Centre Afrique, usines Foxconn en Chine, déchèteries au Ghana, etc.).

Vous n’étiez pas au courant ?

C’est normal. Comme il est tout à fait normal que vous oubliiez tout cela peu de temps après la lecture de ces lignes. Non seulement nous sommes submergés par des publicités vantant les mérites de dispositifs numériques légers et porteurs de bien-être, mais aussi, et surtout, un message, explicite ou tacite, sous-tend notre activité citoyenne et professionnelle : le numérique est et sera l’avenir, il est porteur de progrès et d’innovation ; penser autrement, c’est penser de manière réactionnaire, dans toute la signification péjorative du terme.

Que faire ?

Je n’aborderai ici que la sphère professionnelle liée au e-learning, sa conception et son usage, laissant notamment de côté les sphères privées et politiques.

Il n’y a pas de réponse immédiate et facile à la question : les questions écologiques sont complexes, les réponses à apporter aussi. Mais je peux aiguiller vers deux attitudes importantes à adopter :

  1. En matière de conception, penser à adopter une approche de sobriété et d’éco-conception. Cela commence par compresser ses documents et vidéos (réduire), puis se poser la question de savoir si on a vraiment besoin de ces mêmes vidéos (renoncer), se méfier de solutions logicielles complexes qui nécessitent de puissantes machines pour être utilisées, remettre en cause certaines vieilles habitudes bien ancrées dans les pratiques (utiliser PowerPoint pour faire un cours, stocker les ressources sur des serveurs distants, etc.).
  2. Ne pas céder aux «dernières technologies innovantes», ce sont en général les plus polluantes. Ce n’est pas parce qu’une technologie est nouvelle qu’elle doit nécessairement être adoptée. Rappelons ici un principe de base de conception pédagogique : c’est le besoin qui prime, toute technologie n’est pas en elle-même meilleure qu’une autre approche. On le savait déjà, mais maintenant que l’on connaît les conséquences environnementales, cette sagesse devient d’autant plus essentielle.

Au final, adopter la sobriété numérique c’est bien plus que «faire attention» à ses comportements de consommation. C’est questionner les usages à l’aune de la crise écologique et donc repenser la notion même d’innovation. En effet, cette dernière est, depuis plusieurs décennies déjà, auréolée d’un prestige inconditionnel, et immanquablement associée aux technologies numériques. Il conviendrait d’innover moins et d’innover mieux. Goûter la saine satisfaction d’un usage parcimonieux mais bénéfique du numérique.

Pour aller plus loin...

Des références :

Aggeri, F. (2023). L’Innovation, mais pour quoi faire ? Essai sur un mythe économique, social et managérial. Seuil.

Ferreboeuf, H., & The Shift Project. (2018). LEAN ICT- POUR UNE SOBRIÉTÉ NUMÉRIQUE. https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2018/11/Rapport-final-v8-WEB.pdf

Flipo, F. (2021). La numérisation du monde. Un désastre écologique. Éditions L’échappée.

Julia, L. (2022). On va droit dans le mur ? Pour sauver la planète, il faut un projet de société et une ambition de civilisation. Editions First.

Pitron, G. (2021). L’enfer du numérique : Voyage au bout d’un like. Éditions Les Liens qui libèrent.

Une formation :

La sobriété numérique, le 12 juin 2024.