MOOC, SPOC et autres cours en ligne : quelle place pour les capsules vidéo dans les nouveaux dispositifs de formation à distance ?

On pense souvent que les vidéos représentent l’essentiel des cours en ligne actuels (MOOC et SPOC notamment). Cela est partiellement vrai, tant les vidéos à vocation pédagogique connaissent, depuis quelques années, un fort regain d’intérêt, en particulier dans l’enseignement supérieur (voir, par exemple, Peraya (2017), ou encore Peltier et Campion (2017). Mais c’est tout de même oublier qu’un MOOC (Massive Open Online Course), un SPOC (Small Private Online Course) ou ses équivalents divers sont d’abord des cours, c’est-à-dire des dispositifs de formation qui ont pour finalité première de faire apprendre. Dans cette perspective, les capsules vidéo produites et les traditionnels quiz afférents ne sont pas les seules ressources et activités d’apprentissage proposées. De plus, il convient d’assurer à l’ensemble une articulation cohérente et un scénario pédagogique d’usage ; un MOOC n’est en effet pas un « empilement » de contenus et d’activités mais se veut être un parcours d’apprentissage répondant à une logique mue avant tout par les apprentissages visés.

La conception d’un MOOC va donc bien au-delà de la seule production de capsules vidéo à vocation pédagogique et relève d’une entreprise complexe qui demande à être encadrée par des spécialistes de la formation à distance.

Ce billet a pour objectif de montrer, dans les grandes lignes, quelles sont les principales composantes d’un MOOC, comment les capsules vidéo à vocation pédagogique s’articulent à l’ensemble et quelle démarche d’accompagnement la Cellule MOOC de l’UNIGE met en œuvre pour guider la réalisation de ses MOOCs.

Tout commence par un jeu de cartes…

Chaque nouveau projet débute avec un atelier de travail autour de la conception pédagogique du MOOC. Il s’agit d’amener les enseignants engagés dans la réalisation d’un MOOC à réfléchir en premier lieu aux objectifs généraux de leur cours (en termes de compétences à atteindre) et de décliner, pour chacun des modules qui le composent, des objectifs d’apprentissage spécifiques, opérationnels et mesurables. Cela implique d’avoir délimité de manière la plus précise possible le public auquel s’adresse le MOOC et d’identifier les connaissances préalables éventuellement requises pour son suivi et sa réussite. Cela nécessite également de penser aux activités d’apprentissage à mettre en place et, notamment, aux différents types d’évaluation (formatives et certificatives) qui vont le composer.

L’exercice n’est pas aisé, même pour des enseignants chevronnés. La conception d’un cours entièrement à distance répond en effet à des exigences spécifiques, imposées notamment par une organisation de l’espace et du temps différente de celle qui prévaut dans le cadre des cours présentiels classiques. C’est pourquoi la Cellule MOOC a développé, entre autres supports, un jeu de cartes pédagogiques intitulé MOOC Design Cards, afin d’aider les équipes enseignantes à élaborer ce qui est désigné sous l’intitulé générique de « plan de cours ». Chaque carte (voir illustration 1 ci-dessous) correspond à une activité d’apprentissage succinctement décrite (ici celle d’amener les apprenants à produire une représentation complexe de type schéma, dessin ou poster), à un ou plusieurs types de compétences sollicitées dans le cadre de l’activité (selon la taxonomie de Bloom représentée par le cercle fractionné en bas à gauche de la carte ; ici la capacité de compréhension, d’analyse et de créativité), au type de feedback donné à l’apprenant (feedback donné par l’enseignant, par les pairs, feedback automatique, etc.), enfin au type d’évaluation choisie (formative ou certificative).

Illustration 1 : un exemple de carte et d’activité d’apprentissage

Concrètement, chaque équipe est invitée à travailler sur les objectifs de l’un des modules de leur projet (mis en lien avec la taxonomie de Bloom évoquée ci-dessus) et à leur associer une ou plusieurs des cartes correspondant aux activités susceptibles de favoriser l’atteinte de ces objectifs. La Cellule MOOC les accompagne dans cette première réflexion (voir illustration 2) en les orientant sur l’adéquation des activités choisies avec les objectifs généraux et spécifiques tels que formulés (au besoin, les objectifs sont modifiés), la progression des apprentissages, le type d’évaluation choisi, etc. L’intérêt d’une telle activité est d’amener les équipes enseignantes à s’approprier une méthode d’ingénierie pédagogique et à l’appliquer à l’ensemble des modules, voire à d’autres projets pédagogiques par la suite.

Illustration 2 : travail autour de la conception pédagogique d’un MOOC

Le plan de cours, colonne vertébrale du MOOC

Le plan de cours, constitue le socle fondateur ou, autrement dit, la colonne vertébrale du MOOC, car il fait office de point de référence pour orienter l’ensemble des choix ultérieurs comme la scénarisation des séquences vidéo, la nature et la complexité des ressources complémentaires (lectures par exemple), des évaluations, etc. Ainsi le plan de cours constitue-t-il la synthèse de tous les choix opérés, que ce soit en matière de contenus, d’objectifs, d’activités et d’évaluations.

Un dispositif pédagogique aux composantes multiples

Les capsules vidéo occupent dans cet ensemble une place certes importante (on compte une douzaine d’heures de vidéos pour un MOOC de six modules) mais pas isolée. Leur intérêt majeur réside dans leur articulation avec le reste des composantes d’un MOOC (liste non exhaustive) : lectures, quiz formatifs et certificatifs, échanges réflexifs avec les autres participants, consignes de travail, études de cas évaluées par les pairs, etc. Si la préparation et la réalisation des séquences vidéo demandent une attention particulière (tant sur le plan de la rédaction des scripts que sur celui de la scénographie, du cadrage et de la prise de vue), leur articulation avec l’ensemble des activités d’apprentissage s’avère cruciale pour garantir la cohérence pédagogique du MOOC.

C’est là tout l’enjeu d’un projet technopédagogique complexe qui fait intervenir de multiples acteurs  (enseignants, spécialistes de la formation à distance, spécialistes de la production vidéo) et qui devrait être guidé tout au long de sa réalisation par la finalité rappelée dans la fameuse question de Saint-Onge dans son ouvrage éponyme (1990) : « Moi j’enseigne, mais eux apprennent-ils ? ».