e-Assessment – perspectives et problématiques

Retour sur les eduhub-days 2017 à Lugano

En mode BYOD

La question du e-assessment en « BYOD » (Bring Your Own Device), qui désigne le fait de faire passer les examens aux étudiant·e·s sur leurs propres ordinateurs et/ou tablettes, s’est posée à plusieurs reprises dans les ateliers. Ce cas de figure présente de prime abord des avantages certains :

  • Pour l’institution, il résout des problèmes de logistique (pas de parc informatique à maintenir et réserver pour les examens)
  • Pour l’étudiant·e, il permet de passer l’examen sur un environnement avec lequel il/elle est à l’aise. On peut penser par exemple au cas où le clavier des salles institutionnelles n’est pas forcément le même que celui auquel est habitué·e l’étudiant·e.
  • Des solutions techniques rendent cette configuration possible aujourd’hui (par exemple version pour BYOD de Safe Exam Browser)

Cependant, des limites apparaissent assez vite et doivent prises en compte au cas par cas :

  • En fonction des applications qui sont utilisées pendant l’examen, un·e étudiant·e avec un équipement plus performant pourrait être avantagé·e par rapport aux autres
  • D’un point de vue juridique, il n’est pas évident d’obliger à installer un logiciel qui bloquera temporairement la machine. De plus, dans le cas où un problème se produirait suite à l’installation du logiciel, la responsabilité de l’établissement pourrait être engagée.
  • Enfin, il faut veiller à ce que les salles disposent de suffisamment de prises électriques et d’une bande passante WIFI suffisante.

Examens en-ligne: sécurité et aspects légaux

Outre les aspects spécifiques à l’enseignement à distance, deux préoccupations sont régulièrement au centre du débat sur l’e-Assessment.

Authentification et sécurité

Il s’agit d’abord de s’assurer que le ou la candidate est bien la personne qui a suivi le cursus et qui est habilitée à obtenir titre ou crédit. Ensuite, qu’elle ne dispose que des ressources autorisées et qu’elle ne se fait pas aider par un tiers.

Des système existent (et sont constamment améliorés) pour garantir l’authenticité du/de la candidat∙e. Outre l’utilisation de webcams, il peut être demandé aux candidat∙e∙s d’établir un «typing pattern» en re-copiant un texte en début de cours. D’autres systèmes se basent sur des éléments biométriques, qui, en théorie, pourraient aller de l’empreinte digitale au scan de l’iris ou autre reconnaissance faciale. Une dernière possibilité consiste à faire passer les examens dans des institutions agréées, dans lesquelles l’identité vient à être vérifiée. Comme on peut bien l’imaginer, les coûts marginaux explosent assez vite en fonction du degré de précision et de fiabilité exigé.

En aval de l’examen, l’institution doit garantir l’intégrité des données: il ne doit subsister aucun doute que les informations saisies par l’examiné∙e sont bien celles que l’institution aura reçues. De plus, toutes ces données doivent être conservées dans leur forme originale, afin de pouvoir les produire en cas de recours, notamment. L’infrastructure doit fonctionner sans faille, sur toute la durée de l’examen et garantir un traitement équitable des candidats.

Aspects juridiques

La complexité technique et procédurale des examens en ligne est subordonnée aux impératifs d’ordre juridique. En premier lieu, si l’institution veut vérifier l’identité des candidat∙e∙s en collectant et traitant des données personnelles, elle doit respecter la législation sur la protection des données. Ensuite, elle doit garantir un traitement équitable et objectif lors de procédures de recours. Enfin, elle doit pouvoir prouver au besoin qu’elle a mis les candidat·e·s sur un pied d’égalité.

Les spécialistes s’accordent pour reconnaître les difficultés liées à la démarche: au final, le recul n’est sans doute pas encore suffisant pour décider du niveau du contrôle, tant il est vrai que des titres universitaires, rigoureusement falsifiés, sont toujours et encore disponibles sur le marché noir…

Au final, l’enjeu est pris très au sérieux par les institutions qui se lancent dans l’e-Assessment: un examen annulé suite à une panne informatique, par exemple, a un effet dévastateur sur leur renommée.

e-Portfolio comme outils d'e-Assessment

Parmi les différentes formes d’évaluation formative, celle qui se base sur l’usage du ePortfolio réflexif offre un grand potentiel pour les étudiant·e·s.

Cette solution a été mise en place à la haute école pédagogique de la Fachhochschule Nordwestschweiz. Concrètement, tout au long de son cursus académique, les futur·e·s enseignant·e·s du secondaire sont amené·e·s à poser des réflexions sur les cours et les stages qu’ils et elles suivent. Ces réflexions leur permettent d’identifier les connaissances et les compétences acquises ainsi que leurs forces et leurs faiblesses. Ces réflexions sont ensuite évaluées par l’enseignant·e. Le retour qui est apporté par ce dernier, pilier essentiel du dispositif d’évaluation formative, doit être clair, précis et sa fréquence doit être soutenue. Les commentaires doivent porter avant tout sur les éléments intéressants de la réflexion ainsi que sur les questions qui n’ont pas encore été traitées par l’étudiant·e.

Mise en place depuis le mois de juillet 2016, ce projet pilote sera évalué à la fin de semestre de printemps 2017.

Introduction du service e-assessment à l'UNIGE

Un projet pilote sur l’e-assessment à l’Université de Genève, qui s’inscrit pleinement dans la stratégie de l’Université numérique, a été initié en janvier 2016. Ce projet adresse les nombreuses questions sous-jacentes à cette modalité d’examen qui est en forte demande depuis 2013 par le corps enseignant. Les sessions pilotes réalisées à ce jour ont montré l’importance de mettre en place la chaîne de support et d’impliquer les correspondant·e·s informatiques (support de proximité), condition sine qua non pour assurer un déroulement optimum des sessions d’examen, mais aussi des sessions de tests préalables.
Sur le plan logistique, les pilotes ont montré les limites concernant la question de la disponibilité des salles équipées, ils ont permis également de soulever des questions d’aménagement (aération, sécurité pour des classes de plus de 60 étudiant·e·s, gestion des réservations, etc.) ce qui a amené à revoir la vision de l’infrastructure dédiée aux examens en ligne et de s’orienter vers l’option BYOD qui est certes plus ambitieuse et risquée, mais sur le long terme elle sera probablement plus réaliste si on considère que les étudiant·e·s pour une large majorité possèdent un ordinateur portable. Cette approche prévoit également une infrastructure centrale adaptée pour le déploiement de machines virtuelles.

Ce billet a été rédigé collaborativement par Omar Benkacem, Pierre Lehmann, Patrick Roth et Elsa Sancey.