Repenser l’Évaluation comme levier supplémentaire d’apprentissage au XXIe siècle – Appel à réflexion

La seconde phase d’enseignement à distance imposée par l’évolution de la pandémie de COVID-19 montre que loin d’être une simple parenthèse avant de revenir à la « normale », l’enseignement à distance et plus particulièrement les examens à distance vont devenir une pratique qui va s’imposer durablement et devenir de plus en plus courante en intégrant les méthodes pédagogiques des hautes écoles.

La question cruciale qui se pose dès lors est celle de la garantie de la qualité des diplômes délivrés. Dans le cas particulier des évaluations à distance, il s’agit de s’assurer des conditions dans lesquelles ces évaluations se déroulent et en particulier du contrôle d’identité des étudiants. Ceci est donc directement en lien avec des craintes de triches de toutes natures. A distance, signifie que l’étudiant est loin des yeux et que loin des yeux, il peut, et donc qu’il va forcément tricher. La solution qui semble largement adoptée pour y faire face consiste à rechercher des solutions purement « technicistes » aussi appelé « solutionnisme »[1]. Les examens à distance s’appuyant sur les technologies de l’information et de la communication, il est tentant d’avoir recours à ces technologies pour mettre les étudiants sous étroite surveillance avec comme objectif l’éradication de la triche. Ces méthodes sont regroupées sous le terme de « proctoring ». Elles visent à surveiller l’étudiant soit pour empêcher la triche, soit pour détecter la triche de façon la plus automatisée possible. Elles reposent sur des techniques de plus en plus sophistiquées qui complexifient pour les étudiants, mais aussi pour les enseignants la mise en place et le passage d’un examen. Elles posent aussi par principe une présomption de culpabilité pour l’étudiant, si ce n’est de tricher, au moins de vouloir tricher.

Or comme toute solution purement technique cette approche est probablement vouée à l’échec. A chaque solution technique existe ou existera une contre-solution, parfois toute simple, qui permet de la contourner. Depuis plus d’une décennie que ces plateformes existent les exemples de méfaits ne se comptent plus. De plus de très nombreuses sources expliquent largement comment « contourner » ou abuser ces plateformes, les rendant par conséquent totalement inefficaces. Le même phénomène s’observe avec les virus et les anti-virus. Notons aussi que la complexité des solutions techniques nécessite de la part des hautes écoles de devoir bien souvent déléguer la passation des examens à des entreprises privées qui, si elles les déchargent d’un souci apparemment surtout technique, imposent leurs méthodes pédagogiques d’évaluation.

Les approches traditionnelles des examens sont de plus en plus décalées de la façon dont nous apprenons dans un monde ouvert et connecté. Il nous semble qu’il serait beaucoup plus intéressant de revenir au niveau de la pédagogie et se poser la question de l’objectif de l’évaluation et par conséquent des méthodes à utiliser pour réaliser ces évaluations. Plutôt que de vouloir continuer avec de vieilles recettes qui vont se montrer de plus en plus inadaptées, il s’agit dès lors de se mettre à réfléchir à ce que veut dire « évaluer » de nos jours et par conséquent aux nouvelles modalités qui permettront d’établir un contexte pouvant être par défaut bienveillant, remettant au cœur du processus l’évaluation de l’apprentissage et des connaissances et ne visant pas seulement à établir une quantification aveugle.

Nous lançons ici un appel à rejoindre un groupe de réflexion que nous souhaitons constituer au sein de l’Université. Ce groupe aura pour objectif initial de se questionner sur les formes d’évaluations permettant de privilégier un meilleur apprentissage plutôt qu’une simple quantification ponctuelle. Dans un deuxième temps, le groupe réfléchira aux moyens de mise en œuvre dont les aspects ne sont ni nécessairement ni seulement techniques.

Un premier échange informel est prévu sous la forme d’un Zoom Brown Bag avant la fin du semestre. Si ces questions vous interpellent, merci de compléter le Doodle ci-dessous et d’envoyer un petit message aux adresses suivantes en indiquant : vos noms et prénoms, votre affiliation facultaire et / ou centre, votre rôle (enseignant, responsable de programme, les types de programmes dans lesquels vous êtes impliqués (BA, MA, PhD, FC) ainsi qu’une brève réaction au texte ci-dessus (quelques phrases au maximum, vous pourrez vous exprimer plus longuement par la suite 🙂

Laurent Moccozet, GSEM, CUI, laurent.moccozet @ unige.ch

Jean-Henry Morin, SdS, CUI, jean-henry.morin @ unige.ch

La première réunion du groupe de réflexion se tiendra en ligne en visio-conférence le Mardi 15 décembre entre 12h15 et 13h45.

[1] Quand le solutionnisme et le politique jouent à cache-cache avec la loi, Le Temps, 26 mai 2020. https://www.letemps.ch/opinions/solutionnisme-politique-jouent-cachecache-loi
Le solutionnisme comme foi
https://www.revmed.ch/RMS/2017/RMS-N-577/Le-solutionnisme-comme-foi