La formation hybride, un exemple à Genève

Globalement, on peut définir une formation hybride comme étant une formation qui allie un enseignement avec, à la fois, des séances de travail en présentiel et des séances à distance. La médiation du travail à distance entre les enseignants et les étudiants se fait à travers l’usage de plateformes de travail et d’outils informatiques. A l’heure actuelle, bien que la plupart des formations proposées par l’Université de Genève intègrent l’utilisation de différentes plateformes dans le cadre des cours, on ne peut pas réellement considérer qu’il s’agisse de formations hybrides, car la quasi totalité de l’enseignement transmis par les enseignants se fait lors de séances de cours où les étudiants sont présents. Les enseignants restent bien sûr à disposition des étudiants pour leurs questions et ils transmettent de l’information via des plateformes, mais l’essentiel de l’interaction se passe dans des séances de cours où les deux partis sont présents.

Il existe cependant une formation hybride proposée à l’Université de Genève. Unique en son genre, le Maltt (Master of Science in learning and teaching technologies) est une formation dispensée par l’unité TECFA (FPSE), mais qui reste bien méconnue de la population estudiantine. Pourtant, particulièrement originale dans sa mise en place, c’est une formation qui, à mon avis, présente de nombreux avantages pour les étudiants en terme d’apprentissage.

Pour avoir suivi ce master depuis plusieurs mois maintenant, je peux témoigner des méthodes d’apprentissage et d’enseignement que j’y ai découvertes et qui sont bien différentes de celles que j’ai pu côtoyer durant mon Bachelor.

Tout d’abord, comme il s’agit d’une formation hybride, la majeure partie du travail de l’étudiant se fait à distance. Par exemple, les étudiants n’ont que six semaines de cours à plein temps étalées sur la première année. Même si la distance peut parfois constituer une difficulté dans la gestion des travaux à cause de l’aspect asynchrone des échanges, cela peut présenter un avantage considérable pour l’étudiant dans l’organisation de son temps, car il n’y a pas la contrainte d’un horaire hebdomadaire. Par exemple, cela pourra lui faciliter la gestion d’un emploi à côté de ses études, d’une activité sportive, ou d’autres obligations personnelles. De plus, si l’étudiant vit loin (en l’occurrence loin de Genève), cela lui évite de multiples déplacements. A titre d’exemple, il est arrivé qu’un étudiant suive ce Master tout en vivant à la Chaux-de-Fond, à Fribourg, ou même à Toulouse. Toutefois, que ce soit pour la prise de connaissance des aspects théoriques (les lectures), pour la prise en main de logiciels ou d’outils particuliers, pour les travaux individuels ou les travaux de groupe, j’ai pu observer que des séances de régulation synchrones dans l’échange entre les étudiants et les enseignants étaient presque nécessaires pour un apprentissage optimal. Le nombre de ces séances de régulation peut être faible, mais il en faut au moins une ou deux par période de travail à distance pour faire une mise au point des connaissances ou de l’avance d’un projet lorsqu’il s’agit d’un travail de groupe.

Une seconde particularité de ce master est qu’il ne propose pas de réelle « période d’examens », les délais pour les travaux à rendre sont placés en continu sur toute l’année. La répartition des délais pour les travaux est planifiée à l’avance de sorte à créer le moins de surcharge possible pour les étudiants. A nouveau, cela peut être un réel avantage pour les étudiants qui, comme moi, préfèrent les évaluations continues. Le rythme de travail est certes soutenu, mais avoir des objectifs plus précis dans des laps de temps plus rapprochés est une méthode d’apprentissage qui peut convenir plus à certains étudiants qui se sentiraient moins disciplinés dans la planification de leur apprentissage. De plus, la reddition de travaux intermédiaires engage un retour de la part de l’enseignant, ce qui pour l’étudiant peut constituer une motivation supplémentaire à améliorer son travail et évoluer dans son apprentissage.

Un autre aspect du Master qui peut particulièrement être apprécié des étudiants est la mise en pratique directe du contenu d’apprentissage. Les études sont orientées vers les technologies éducatives et afin de permettre aux étudiants de comprendre l’implication de l’utilisation des technologies dans l’enseignement et dans la formation, ceux-ci sont amenés à utiliser plusieurs plateformes, logiciels et outils technologiques pour leur propre formation. Les étudiants utilisent donc des forums pour échanger entre eux et avec les enseignants, des wikis et des logiciels de traitement de texte pour composer leurs travaux, des outils auteurs pour créer des jeux pédagogiques, des agendas électroniques pour s’organiser, des outils de gestion de projet pour collaborer, et bien d’autres encore. La prise en main et la familiarisation de tous ces logiciels et outils technologiques peut présenter un réel défi pour l’étudiant au début de la formation. Mais, petit à petit, il pourra voir la plus-value dans cet apprentissage des nombreux outils et logiciels différents puisqu’il sera particulièrement à même d’évaluer les difficultés que peut rencontrer un apprenant dans une formation hybride, étant lui-même dans cette position. L’utilisation directe des méthodes d’apprentissage et d’enseignement, qui constituent à la fois le contenu étudié et les procédés de mise en pratique de ce contenu, relève d’une mise en abime plutôt ingénieuse permettant à l’étudiant de rapidement faire le lien entre les aspects théoriques et professionnels de ses études. A l’heure où l’on reproche parfois à l’Université de ne pas être assez professionnalisante et trop académique, voilà un Master qui pourrait bien démontrer le contraire !

Enfin, tous les éléments évoqués ci-dessus favorisent une communication privilégiée entre les étudiants et les enseignants. En effet, dans leurs interactions, les étudiants et les enseignants se retrouvent très souvent dans une position de réciprocité dans l’apprentissage. Chacun a quelque chose à apporter à l’autre. Ainsi, les étudiants apprennent rapidement à envisager leurs enseignants comme des tuteurs. Ce positionnement particulier des enseignants peut placer les étudiants en situation plus facile pour communiquer, exprimer leurs idées librement et échanger avec les autres. Du moins, ce fut le cas pour moi et d’autres étudiants qui ont exprimé un avis similaire. En période de cours en présentiel, cette interaction particulière entre les étudiants et les enseignants a facilité largement l’interaction : les étudiants participaient plus, posaient plus de question, l’échange était engageant, car l’enseignant était un partenaire dans la communication. J’ai pu observer que, par rapport à ma formation initiale (Bachelor), les étudiants se sentaient plus libres d’exprimer ce qu’ils pensaient, mais également d’approfondir leurs idées ; ils se sentaient plus libres d’essayer et de se dépasser, de se surpasser. En somme, il me semble que ce type d’interaction favorise l’innovation chez les étudiants et « la classe » devient plus qu’un simple ensemble d’auditeurs: un groupe de travail. Ainsi, j’observais aussi que les échanges entre les étudiants eux-mêmes lors de travaux de groupe, étaient également améliorés. Les effectifs étant petits, les travaux se font soit de manière individuelle, soit par petits groupes. Les étudiants venant de tous les horizons avec des parcours d’étude et de vie très différents, et la communication étant facilitée et fluidifiée par des échanges réciproques à la fois entre les étudiants et avec les enseignants, ils apprennent plus facilement à dialoguer, négocier, travailler, échanger avec des personnes qui peuvent avoir un background radicalement différent et des idées diamétralement opposées.

Pour conclure, le travail à distance, l’évaluation continue, la mise en pratique immédiate du contenu étudié, la relation de tutorat avec les enseignants et les nombreuses occasions de collaboration en petits groupes sont autant d’éléments qui distinguent ce Master des autres formations universitaires. Si les étudiants pourront y trouver certains avantages évoqués auparavant, ils devront cependant, au cours de cette formation, faire un petit travail personnel supplémentaire : une petite révision de leur conception de l’apprentissage. En effet, les méthodes d’apprentissage étant bien différentes dans une formation hybride, cela nécessite un travail sur soi pour aborder différemment son propre apprentissage. Mais le bénéfice pourrait s’avérer d’autant plus grand. Il y aurait également un intérêt pour les enseignants de découvrir les méthodes d’apprentissages utilisée dans cette formation, notamment l’utilisation des nouvelles technologies pour l’enseignement. Il est vrai qu’à la vue de l’utilisation croissante des nouvelles technologies au sein de l’Université, l’usage adéquat d’outils et des logiciels informatiques dans un scénario pédagogique adapté n’est pas de toute évidence. Le Maltt entrevoit justement ces problématiques et propose des solutions étudiées. Cela pourrait donc être intéressant, tant pour les étudiants que pour les enseignants, de se renseigner sur ce que cette formation à offrir. Pour cela, rendez-vous sur leur site, où vous trouverez notamment les témoignages des anciens étudiants qui vous permettront d’envisager les nombreuses perspectives d’avenir.